Né à Harlem dans une famille modeste venue de Jamaïque, Colin Powell grandit dans le Bronx. Grand admirateur de Martin Luther King, c’est l’un des hommes les plus populaires des États-Unis et pour beaucoup de Noirs américains le symbole de l’effort personnel et de la réussite individuelle.
Sa carrière militaire commence en 1958, après des études et un diplôme de géologie. Dans ses mémoires, « Un enfant du Bronx », Colin Powell raconte le Vietnam, la jungle, l’ennemi invisible et les embuscades. Son premier séjour s’y termine sur une blessure. Cinq ans plus tard, en 1963, un second séjour le « jette en enfer »: l’opinion publique américaine, devenue pacifiste, est en colère et chez les militaires désormais directement engagés le moral est au plus bas. À son retour, s’il garde des épreuves traversées entre soldats un peu de nostalgie, le commandant Powell adhère totalement à la réforme et à la modernisation de son armée.
Les fonctions qu’il occupe le placent ensuite au contact direct des plus hautes autorités du pays. Ainsi est-il chef d’état-major des armées depuis un an quand Saddam Hussein décide d’envahir l’émirat du Koweït. Colin Powell prend la tête des troupes américaines et alliées et les mène à la victoire. Une victoire qui, au début du conflit, ne va pas de soi car l’armée irakienne est alors la quatrième du monde, même si sa chaîne logistique n’est pas très fiable et ses positions sur le sol koweïtien plutôt statiques. Il faut compter également avec une menace chimique bien réelle: l’Irak détient un important arsenal chimique et Saddam Hussein n’a pas hésité à en faire usage contre les Iraniens et les Kurdes.
À l’aube de la guerre du Golfe, le général Colin Powell développe une doctrine militaire, qui porte son nom, dans laquelle sont définies les règles d’engagement des États-Unis dans un conflit militaire. Assumant l’influence de Clausewitz, il est convaincu qu’on ne commence pas une guerre sans avoir au préalable réfléchi à quoi l’on s’engage, qu’il ne peut y avoir de guerre sans but clair et accessible. Il s’agit également de ne pas se lancer dans un conflit sans le soutien de la population américaine et de la communauté internationale, d’évaluer les conséquences de l’intervention et de prévoir une stratégie de sortie pour éviter un embourbement. C’est ainsi qu’au début de l’opération Desert Shield, il fait expédier aux principaux commandants présents sur le terrain un exemplaire du livre de Fred Iklé, « Every war must end ». Contrastant avec ceux consacrés à la stratégie, et qui négligent le délicat sujet de la sortie de guerre, cet ouvrage sera réédité fin 1991, avec un nouveau chapitre dédié à la guerre du Golfe.
Quand il revient, 20 ans après, sur cette première guerre du Golfe, Colin Powell rappelle qu’il n’était alors pas question de renverser un gouvernement, mais de ramener un État souverain dans les limites de ses frontières.